Loin du textile. Les anciens garçons ouvriers de la Manufacture d’Annecy et Pont au tournant des XIXe et XXe siècles

par Nicolas Martignoles

« Il arrive généralement que la Manufacture n’emploie plus les jeunes gens, lorsqu’ils ont atteint l’âge de vingt ans. »

Cette phrase est extraite d’un courrier daté du mois d’avril 1879 et adressé au commissaire de police d’Annecy par Frédéric Laeuffer, directeur de la Manufacture d’Annecy et Pont1. Apparue en 1804, l’entreprise textile qu’il dirige réalise alors toutes les opérations relatives au travail du coton. Comme son nom l’indique, elle possède deux unités de production localisées de part et d’autre des Alpes : la première est constituée d’un ensemble de bâtiments situés le long du Thiou dans les communes d’Annecy et de Cran2, tandis que la seconde est établie dans le village de Pont-Canavese, à une cinquantaine de kilomètres au nord de Turin. Après avoir marqué la vie économique savoyarde par son dynamisme pendant la première moitié du XIXe siècle, la Manufacture connaît ensuite des difficultés économiques nombreuses ; en effet, elle utilise une matière première venue de loin, en l’occurrence des Etats-Unis et d’Egypte, et dont le coût subit un renchérissement significatif après la guerre de Sécession (1861-1865). En outre, elle se heurte à une forte concurrence internationale, aggravée par la signature des traités de libre-échange entre la France et ses voisins dans la décennie 1860. Frédéric Laeuffer et son père Jean, décédé en 1874, sont conscients de ce retournement de tendance : ils font donc de leur mieux pour moderniser l’entreprise, investissant dans de nouvelles machines et cherchant à rationaliser l’utilisation des cours d’eau qui alimentent en énergie les sites de production. Mais la conjoncture est capricieuse et le chiffre d’affaires varie dangereusement. Ainsi, au moment même où Frédéric Laeuffer s’entretient avec le commissaire de police d’Annecy, le résultat des ventes souffre d’un contexte de déflation à l’échelle européenne et baisse pour la troisième année consécutive3.

Néanmoins, la Manufacture demeure le premier employeur privé d’Annecy jusqu’à la Première Guerre mondiale et ne ferme définitivement ses portes qu’en 1955. Ses difficultés n’expliquent donc pas à elles seules le départ de ses « jeunes gens » lorsqu’ils approchent de l’âge adulte. Le phénomène est ancien4 et pose donc la question suivante : que deviennent les garçons et les filles qui ont travaillé pour elle dès l’adolescence ? Au moins trois types de sources peuvent être utilisés et croisés pour tenter d’étudier leurs trajectoires. Le premier renvoie à deux registres du personnel, l’un utilisé à la filature Sainte-Claire5 et l’autre au tissage de Cran6 : ils permettent de collecter les noms de milliers d’ouvriers mais perdent la trace de la majorité d’entre eux, dès lors qu’ils quittent l’entreprise. C’est là que les listes de recensement jouent un rôle important, à la condition d’être accompagnées de tables alphabétiques : sans elles, retracer le parcours de vie d’un individu revient à chercher une aiguille dans une botte de foin. Enfin, et même surtout, les fiches matricules peuvent être utilisées. Numérisés sur le site des Archives départementales de la Haute-Savoie7, ces documents militaires sont particulièrement utiles pour qui veut travailler sur les mobilités géographiques et professionnelles d'un individu ; en effet, ils mentionnent la commune de naissance, le domicile et la profession exercée par chaque homme appelé sous les drapeaux, ainsi que le nom et la commune de ses parents. Par ailleurs, ils recensent les localités successives habitées, donnent divers détails relatifs aux campagnes effectuées et font état de la bonne conduite comme des condamnations judiciaires, civiles ou militaires.

Le recours aux fiches matricules possède un défaut majeur qui n’est pas anodin lorsqu’il s’agit d’étudier le personnel d’une usine textile au XIXe siècle: il exclut les femmes qui sont nombreuses à la Manufacture d’Annecy et Pont, qu’il s’agisse de la filature Sainte-Claire et plus encore du tissage de Cran. C’est donc une étude « masculine » qui va être présentée ici et elle possède une autre limite : elle n’est pas exhaustive ; en effet, il n'est pas possible d’étudier le cas de tous les hommes mentionnés dans les deux registres du personnel, et ce pour plusieurs raisons. Entre 1872, année du rétablissement d’un service universel masculin, et 1877, la consultation des fiches matricules est malaisée puisqu’elles dénombrent plusieurs individus par page. Le choix s’est donc porté sur celles disponibles à partir de 1878 qui ont l’avantage de ne présenter qu’un seul individu par page. Par ailleurs, plusieurs fiches matricules sont manquantes: celles des morts évidemment, des individus qui ont quitté la Haute-Savoie avant l'appel et de ceux dont le nom ont fait l'objet d'une faute d'orthographe lors de leur embauche à la Manufacture. Enfin, tous ceux dont l'identité peut prêter à confusion ont été exclus, en raison d'une homonymie ou d'un doute quant au prénom : prénom simple sur un document et composé sur un autre, deuxième prénom différent…

Au final, le croisement des sources aboutit à la constitution d’un groupe de 114 garçons ouvriers, nés entre 1858 et 1869. 71,92 % d’entre eux sont nés à Annecy et 21,92 % dans des communes proches, notamment Gevrier (aujourd’hui Cran-Gevrier), Seynod et Poisy. Dans l’immense majorité des cas, la reconstitution des trajectoires professionnelles et géographiques à l’âge d’homme confirme une rupture avec la Manufacture d’Annecy et, plus encore, avec l’industrie textile. De plus, leur mobilité géographique est non négligeable et présente des traits communs avec les résultats des travaux pionniers que Paul Guichonnet a consacré dès les années 1940 à l’émigration des Savoyards8.

Portrait de Frédéric Gachet : une carrière cotonnière devenue marginale.

filatureCette photographie a été prise dans l’enceinte de la filature Sainte-Claire et semble dater de la décennie 1890. La vue des garçons installés au premier rang confirme la jeunesse d’une partie du personnel de la Manufacture mais a aussi le mérite de représenter trois hommes retrouvés grâce à la consultation des fiches matricules. Il s’agit de Frédéric Gachet, de Joseph Genis Busca et de Joseph Paccoret, respectivement situés aux troisième, huitième et dixième places en allant de gauche à droite. Ils font partie d’un groupe de sept travailleurs du coton, tous employés à la Manufacture à l’âge de 20 ans : ces hommes représentent 6,14 % de l’effectif étudié, ce qui est peu et qui confirme la faiblesse du lien entre les hommes adultes et l’entreprise. Bien qu’ils aient passé un temps variable dans l’entreprise, leurs cas permettent « de raisonner à partir de singularités et non à propos de singularités9» . De ce point de vue, la carrière de Frédéric Gachet est révélatrice d’une longue fidélité au métier de fileur mais aussi de son caractère ultra-minoritaire dans l’évolution professionnelle des garçons de la Manufacture.

Né le 06 janvier 1860 à Annecy10, Frédéric Gachet n’a pas l’occasion de connaître son père, mort un mois avant sa naissance et exerçant le métier de jardinier. La profession de sa mère demeure inconnue, ce qui est en soi un renseignement : le personnage ne semble pas s’inscrire dans une tradition familiale liée à la Manufacture lorsqu’il entre à l’âge de 11 ans comme rattacheur à la filature Sainte-Claire. Comme son frère Eugène, sa mission consiste alors à se glisser sous les métiers pour rattacher les fils qui se cassent. A l’âge de 20 ans, il exerce la profession de fileur, la mieux rémunérée de l’entreprise avec un salaire quotidien oscillant entre 2,5 et 4,5 francs par jour11. Et pour cause : l’assemblage des fils en un ensemble homogène d’un diamètre précis est un savoir-faire précieux qui conditionne pour partie le niveau des ventes. En 1888, Frédéric Gachet épouse Joséphine Dufournet qui a huit ans de moins que lui et exerce la même profession dans la même usine. La chose n’est pas surprenante, tant il est vrai que « l'homogamie sociale fait peu de doutes12» mais il n’est pas anodin de relever que les parents de la mariée se tiennent alors à l’écart du textile puisqu’ils sont l’un journalier et l’autre ménagère. Les deux époux savent signer leur acte de mariage et ne choisissent qu’un seul fileur parmi leurs quatre témoins de mariage, leur préférence allant à un entourage familial représenté par deux frères de Frédéric Gachet. Néanmoins, ce dernier évolue dans un ensemble de liens interpersonnels qui confortent son appartenance à l’aristocratie de la Manufacture. C’est ainsi qu’en 1891 il fait partie des trois fileurs sur coton qui sont les témoins de mariage de l’un des leurs : il s’agit d’Antoine Marie Jouvenoz sur lequel nous reviendrons un peu plus loin.

A l’occasion du recensement de 1901, Frédéric Gachet travaille toujours comme fileur à la filature Sainte-Claire, contrairement à son épouse qui n’exerce plus de travail salarié et se consacre à l’éducation des cinq enfants du couple, ainsi que d’un bébé placé en nourrice. Cinq ans plus tard, notre homme est délivré de ses obligations militaires et sa fiche matricule ne comporte toujours aucune trace de changement professionnel. Est-ce le cas au moment de sa mort ? La consultation des registres de décès disponibles en ligne jusqu’en 1919 ne permet pas de répondre à cette question. Quoi qu’il en soit, son parcours offre un témoignage d’une longévité remarquable au service de la Manufacture d’Annecy et Pont. Cette situation se double d’une véritable fidélité à l’entreprise dans la mesure où aucune trace de conflit social ne peut être relevée entre les fileurs et la direction tout au long de la période considérée : de ce point de vue, ce groupe professionnel se distingue des tisseuses de Cran-Gevrier en lutte pour leurs salaires en 1872, 1888 et 190213.

Rester à la manufacture : un choix possible mais pas définitif.

filature2Cette photographie appartient au même ensemble que celle présentée plus haut mais elle représente le personnel chargé du battage et de la carderie à la filature Sainte-Claire. La première opération constitue la première étape du processus de filature puisqu’elle consiste à disloquer les fibres brutes afin de les débarrasser de leurs impuretés. Une fois battues, les fibres sont lavées et confiées aux cardeurs et aux cardeuses qui se chargent de les démêler et de les rendre parallèles, afin de les transformer en rubans. Pour cela, ils utilisent une machine, la carde, généralement constituée d’un cylindre horizontal sur lequel sont disposés des crochets acérés. Parmi les ouvriers qui effectuent ce travail, l’un d’entre eux est identifiable au deuxième rang, complètement à gauche de la photographie : il s’agit de Clément Bernard. Né le 23 novembre 1862 à Annecy d’un père inconnu et d’une mère journalière14, Clément Bernard entre à l’âge de 15 ans à la filature Sainte-Claire où il débute comme bobineur, c’est-à-dire comme employé à l’enroulage des fils sur les bobines. Annécien embauché dans une entreprise annécienne, il se démarque cependant de la majorité des ouvriers de son âge qui travaillent comme rattacheurs ; en effet, il a vécu quelque temps auparavant à Remiremont, dans les Vosges. Cette ville est alors une place forte du textile lorrain grâce à la présence de deux grandes usines, celles de la Madeleine et de Béchamp. Il est tout à fait probable que le jeune garçon y ait réalisé un apprentissage textile avant de revenir dans sa ville natale et d’y travailler à la Manufacture.

Au moment de son incorporation dans l’armée, les militaires l’enregistrent comme cardeur et son acte de mariage porte aussi la trace de cette profession : le 27 octobre 1888, il épouse Françoise Combronde, de sept ans sa cadette et tisseuse sur coton à la Manufacture15. La jeune femme est aussi la fille d’un collègue de Clément Bernard : il s’agit de Guillaume Combronde, cardeur lui aussi et visible sur la même photographie que son gendre, puisqu’il est installé au premier rang et à la troisième place en partant de la droite. A la différence des fileurs évoqués précédemment, notre cardeur et sa femme ne choisissent aucun travailleur de la Manufacture parmi leurs quatre témoins de mariage : c’est peut-être le signe d’un rapport plus distant au métier exercé, marqué par un moindre prestige social. Quoi qu’il en soit, sa femme est la soeur de Marie Combronde qui sera la secrétaire-adjointe du Syndicat des ouvrières et ouvriers des manufactures de tissage et filature d’Annecy et Cran, fondé après l’échec de la grève des tisseuses en 190216. En outre, sa propre soeur, Jeannette Bernard, est l’épouse de Joseph Pacoret qui travaille comme fileur à Sainte-Claire. Au passage, on notera que ce couple-ci choisit des hommes de la Manufacture comme témoins17, à l’instar de Frédéric Gachet et d’Antoine Marie Jouvenoz mentionnés précédemment.

En 1901, l’inventaire des recensements de la commune d’Annecy indique que Clément Bernard est devenu chauffeur. Le nom de son employeur nous est inconnu, ce qui ne permet pas de savoir s’il conduit un véhicule ou s’il est chargé d’alimenter en combustible une machine. Travaille-t-il toujours à la Manufacture, comme c’était le cas au moment de vingtième anniversaire ? Il est permis d’écrire que non ; en effet, le registre des recensements mentionne traditionnellement la Manufacture ou chez Laeuffer lorsqu’il s’agit de la Manufacture d’Annecy et Pont. C’est d’ailleurs le cas pour son épouse, présentée comme tisseuse sur coton chez Laeuffer18. Son acte de décès semble confirmer ce changement de trajectoire professionnelle puisqu’il le présente comme manœuvre au moment de sa mort le 23 novembre 190519.

L’éloignement du monde de l'usine

Ainsi, Clément Bernard se rapproche de Frédéric Gachet par son insertion dans un réseau de liens interpersonnels marqués par la vie dans et autour de la Manufacture d’Annecy et Pont. Néanmoins, ses rapports professionnels et familiaux ne sont pas suffisamment puissants pour qu’il y effectue la totalité de sa carrière. Son parcours de vie n’est pas le seul à porter la trace de cette rupture bien après l’âge de 20 ans : trois autres travailleurs du coton sont dans ce cas sur les sept recensés par nos soins au moment de leur passage sous les drapeaux. La chose peut se comprendre : pourquoi continuer à percevoir des salaires fluctuants, a fortiori dans une entreprise en déclin ? L’échelle locale n’est d’ailleurs pas la plus révélatrice d’un phénomène observable dans l’ensemble de l’industrie textile qui a perdu le rôle moteur qui était alors le sien pendant la première phase de l’industrialisation, c’est-à-dire jusqu’aux années 1880. Au tournant du XXe siècle, la ville de Saint-Étienne offre alors le même exemple20.

Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que la centaine d’hommes dont nous avons retrouvé la trace s’éloigne de l’industrie textile. Tous les résultats qui vont suivre concernent des hommes qui travaillent en dehors de la Manufacture. Sur le plan numérique, la profession la plus représentée est celle de manœuvre, à hauteur de 12,28 % de l’effectif. Cependant, il est impossible de la rattacher à une activité particulière. En revanche, celle de chapelier est beaucoup plus identifiable : elle concerne 9,64 % des individus considérés ici. De ce point de vue, il n’est pas inutile de mentionner que les ouvriers d’Annecy qui fabriquent des chapeaux s’organisent en syndicat en 189421. L’un de ses trois fondateurs, Jean Dunoyer, apparaît d’ailleurs dans notre liste et franchit un palier supplémentaire dans l’engagement syndical puisqu’il devient trésorier de la Fédération des syndicats ouvriers d’Annecy en 190122.

Si l’on raisonne en termes de branche de métier à présent, les chapeliers sont détrônés par les hommes du bâtiment : on dénombre six tailleurs de pierre, cinq charpentiers, deux peintres, un maçon et un plâtrier. Ces quinze personnes représentent 13,15 % de notre échantillon, ce qui n’est pas surprenant puisque tout au long du XIXe siècle, Annecy connaît de nombreux travaux d’aménagement qui répondent à son développement démographique et économique.

Toujours selon une logique de branche professionnelle, la profession de cultivateur n’est exercée que par six individus, soit 5,26 % des 114 hommes retenus pour cette étude. Si le résultat est non négligeable, force est de constater qu’il est très minoritaire. La chose n’est pas surprenante pour un échantillon majoritairement urbain mais apporte un renseignement important: dans la deuxième moitié du XIXe siècle, le monde de la terre se tient nettement à l’écart de la Manufacture23.

En résumé, les anciens garçons ouvriers de la Manufacture d’Annecy sont peu nombreux à utiliser le savoir-faire textile qu’ils ont acquis dans l’entreprise. Plus largement, c’est surtout leur éloignement avec le monde de l’usine qui retient l’attention : au-delà de l’extraordinaire diversité des situations professionnelles qui rend délicate toute tentative de regroupement, on a là un secteur tertiaire considérable avec un noyau important d’artisans. Parmi ces hommes, nombreux sont ceux qui n’hésitent pas à quitter Annecy pour trouver de l’ouvrage, parfois sur de longues distances.

Des hommes mobiles sur le plan géographique

Sur les 114 hommes dont la trace a pu être retrouvée, douze participent à des campagnes militaires qui prennent la forme de conquêtes coloniales en Algérie et ailleurs en « Afrique » mais aussi en Cochinchine et au Tonkin, respectivement situés dans les parties Sud et Nord de l’Indochine française. Cependant, leurs cas n’ont pas été pris en compte dans l’étude de la mobilité géographique ; en effet, ils sont le résultat d’affectations au gré des besoins de l’armée et non d’une stratégie individuelle ou familiale de déplacement.

Tableau n°1 a : Mobilité géographique de 114 anciens garçons ouvriers de la Manufacture selon leurs fiches matricules

Migrants lointains (distance supérieure à 25 km) | Migrants proches (distance inférieure à 25 km) | Sédentaires | Indéterminés | Total

Nombre d’individus en valeur absolue : 67 | 7 | 36 | 4 | 114
Nombre d’individus en valeur relative (%) : 58,77 | 6,14 | 31,57 | 3,50 | 99,98

Tableau n°1 b : Communes de résidence des migrants lointains (distance supérieure à 25 km)

Migrants lointains installés à Lyon | Migrants lointains installés à Paris | Migrants lointains installés à Genève | Migrants lointains installés à Grenoble | Migrants lointains installés dans d’autres communes | Total

Nombre d’individus en valeur absolue : 21 | 16 | 14 | 7 | 9 | 67
Nombre d’individus en valeur relative (%) : 31,34 | 23,88 | 20,89 | 10,44 | 13,43 | 99,98

Le premier tableau résulte d’une comparaison entre la commune de naissance d’un individu, sa commune de résidence à l’âge de 20 ans et les localités successives habitées mentionnées sur sa fiche matricule, selon le modèle proposé par Paul-André Rosental qui distingue les migrants lointains, les migrants proches et les sédentaires, la limite kilométrique entre les deux premières catégories s’établissant autour de 25 kilomètres car au-delà, « on sort des trois ou quatre premiers cercles de communes contiguës24» . On le sait, une limite peut faire débat mais on retrouve l’établissement de catégories similaires de la part de Jean-Claude Farcy et d’Alain Faure qui fondent leurs analyses des mobilités dans et vers à Paris à la fin du XIXe siècle sur les émigrés, les mobiles locaux et les stables25. Quoi qu’il en soit, les migrants lointains sont majoritaires puisqu’ils représentent 58,77 % de l’effectif mais les sédentaires représentent un homme sur trois environ. Dans ces conditions, les migrants proches qui se déplacent sur une distance inférieure à 25 kilomètres ne constituent qu’une petite minorité.

« A la veille de la Première Guerre, l’émigration savoyarde amorce un tournant, qui va s’accentuer après 1918, et surtout après la Seconde Guerre mondiale. L’exode demeure concentré à Paris et Lyon, mais il commence à perdre son caractère d’expatriation masculine de nécessité, dû à la pauvreté et au manque de débouchés en Savoie, pour revêtir l’aspect d’un phénomène de mobilité sociale […] »26.

Ecrites par Paul Guichonnet en 1982 au sujet des migrations savoyardes à Paris, ces quelques lignes s’appliquent tout à fait aux résultats du deuxième tableau, uniquement consacré aux migrants lointains et à de grandes villes dans lesquelles ils se sont installés pour une durée variable. On gardera en tête qu’un même individu peut avoir vécu dans plusieurs d’entre elles. 31,34 % des migrants lointains s’installent à Lyon à un moment ou à un autre de leur vie tandis que 23,88 % se tournent vers Paris. Sans surprise, Genève représente aussi un pôle de migration non négligeable même si l’on aurait pu s’attendre à ce que sa proximité géographique avec le bassin annécien attire davantage d’individus.

Quelle est la mobilité géographique des travailleurs du coton identifiés à l’âge de vingt ans ? Frédéric Gachet, Clément Bernard et Joseph Pacoret appartiennent au groupe des sédentaires qui se fixent définitivement à Annecy mais d’autres ouvriers textiles quittent la ville pour une durée variable. C’est le cas par exemple d’Antoine Marie Jouvenoz. Né le 22 avril 1862 à Annecy d’un père fileur et d’une mère tisseuse27, notre homme entre à la filature Sainte-Claire à l’âge de 12 ans. En 1887, l’armée mentionne son installation à Toulon pendant quelques mois. Il revient rapidement à Annecy où il se marie le 06 juin 1891 à Joséphine Murgier, tisseuse sur coton28. En 1891 et en 1892, c’est son frère Francis Louis, enregistré comme journalier, qui prend le chemin du Var puisqu’il habite Porquerolles. Il est clair que les deux frères ont un point de chute dans ce département mais il est impossible d’en savoir plus sur leur situation professionnelle exacte. En tout cas, les frères Jouvenoz montrent que « la définition classique de la migration comme un changement de résidence et l’opposition qui en découle entre un point de départ et un point d’arrivée [se] trouvent relativisées au profit d’un raisonnement en termes de circulation dans un univers familier, lequel peut inclure des destinations géographiquement éloignées »29. Ils sont aussi la preuve qu’il est possible d’effectuer un retour vers son lieu d’origine. Auguste Ramus en fournit un autre exemple. Né le 14 janvier 1862 à Annecy d’un père fileur et d’une mère dévideuse30, cet individu entre sans surprise à la filature Sainte-Claire à l’âge de 12 ans. En 1888 cependant, sa fiche matricule enregistre son installation au hameau de Vanchy à Bellegarde-sur-Valserine. Devenu journalier, cette étape n’est que transitoire puisqu’il meurt à Annecy le 27 août 190531.

Néanmoins, les écrits de Paul Guichonnet accréditent l’idée qu’une part croissante d’individus ne reviennent pas vivre sur le lieu de leurs origines. Devant l’impossibilité de retrouver tous les actes de décès des personnes considérées, il faut se contenter des fiches matricules qui contiennent des renseignements sur les hommes jusqu’à ce qu’ils soient libérés de leurs obligations militaires, c’est-à-dire à l’âge de 45 ans. Leur consultation montre qu’à cet âge, 49 migrants lointains sur 67 ne sont toujours pas revenus à Annecy ou dans leur commune de naissance, soit 73 % de l’effectif considéré. C’est le cas par exemple de Joseph Genis Busca. D’origine italienne, il naît le 24 décembre 1867 à Clermont-Ferrand32 puis entre à l’âge de 12 ans à la filature Sainte-Claire. Au moment d’effectuer son service militaire, il y travaille comme fileur mais exerce la profession de galochier au bout de quelques années, d’abord à Annecy puis à Grenoble en 1915. L’éloignement géographique mis en lumière ici n’est pas le fait d’un métier ou d’une branche professionnelle en particulier. Il relève peut-être d’une stratégie qui consisterait à accroître les revenus familiaux grâce au départ des jeunes hommes mais la chose ne transparaît pas dans les résultats que nous avons obtenus. Ainsi, les quatorze fratries identifiées grâce au croisement entre les fiches matricules et les registres d’embauche de la Manufacture d’Annecy présentent une diversité de modèles en termes de mobilité géographique : un frère part et l’autre reste, les deux partent ou alors les deux restent.

La démarche suivie ici ne permet donc pas de « réévaluer le rôle des dynamiques familiales dans le déclenchement des migrations »33. En revanche, elle montre un lien entre la mobilité géographique et le résultat des recensements à Annecy au XIXe siècle. Entre 1808 et 1858, la ville connaît une multiplication par deux du nombre de ses habitants : il atteint le chiffre de 10 374 à la veille de l’Annexion de la Savoie à la France. Entre 1872 et 1881, la population baisse puisqu’elle passe de 11 581 à 11 334 habitants. Au cours de cette période de neuf ans, l’année 1876 est même marquée par un recul à 10 976 individus34. A partir de 1881, la croissance démographique ne se dément plus jusqu’à la Première Guerre mondiale. Nés entre 1858 et 1869, les anciens garçons ouvriers étudiés ici appartiennent à une génération annécienne marquée par le déclin de la Manufacture d’Annecy et Pont mais aussi par un ralentissement économique d’envergure européenne, désigné par l’expression « Longue Dépression ». Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que la mobilité professionnelle mise en lumière précédemment se double d’une mobilité géographique qui permet aux individus de s’adapter aux évolutions de l’économie locale.

Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, les « jeunes gens » qui quittent la Manufacture d’Annecy et Pont renoncent à faire carrière dans l’industrie textile et dans une large mesure, à l’industrie tout court. Aucun des 114 garçons ouvriers dont nous retrouvé la trace ne se fait embaucher aux Forges de Cran ou aux Papeteries Aussedat qui connaissent pourtant un dynamisme marqué dans le dernier tiers du XIXe siècle. L’origine majoritairement urbaine de ces hommes ne les prédispose pas non plus à intégrer le monde de la terre, même s’il est intéressant de constater que la poignée originaire des familles paysannes y reste fidèle. Du point de vue professionnel, l’information la plus saisissante concerne sans aucun doute l’orientation vers les ateliers et les chantiers de construction. Afin d’étudier la mobilité professionnelle à l’échelle de deux générations, il aurait pu être tentant de comparer la profession de ces hommes avec celle de leurs parents mais celle-ci n’est pas mentionnée sur les fiches matricules. En revanche, elle l’est sur les actes de mariage. Nous aurions donc pu utiliser les actes de mariage des parents mais cela aurait posé un problème méthodologique, signalé dans l’ouvrage de Jacques Dupâquier et de Denis Kessler35 : dans quelle mesure la comparaison entre la profession d’un fils de et celle de son père, âgé au moins du double, est-elle pertinente ? La démarche est particulièrement exposée au biais, c’est-à-dire à une déformation des résultats. Le risque serait de surestimer la continuité ou alors la rupture professionnelle entre les générations.

Quant à la mobilité géographique, elle n’est pas étrangère à tous ces hommes : c’est l’autre enseignement de cette étude consacrée à d’anciens garçons de la Manufacture. La commune d’Annecy et ses voisines voient une partie de leurs forces vives prendre la route sur des distances parfois fort longues mais, pour certaines d’entre elles, identifiées depuis au moins un siècle par les Savoyards : d’une certaine manière, Lyon et Paris sont des villes savoyardes, identifiées comme telles par les travaux de Paul Guichonnet. L’établissement hors du territoire local n’est pas forcément définitif mais les retours ne sont pas systématiques non plus en cette fin de XIXe siècle. Mieux encore : revenir sur ses pas n’empêche pas un nouveau départ ; en effet, un tiers de ceux qui retournent dans leur commune d’origine prend à nouveau la route pour des destinations diverses. C’est la preuve d’un rapport ambivalent au lieu d’origine, point d’ancrage pour les uns et source d’insatisfaction pour les autres.

Tableau n°2 : Trajectoires suivies à l'âge d'homme par 114 anciens garçons ouvriers de la Manufacture selon leurs fiches matricules

Nom et prénom de l'ouvrier | Date de naissance | Lieu de naissance | Classe | Profession | Résidence et localités successives habitées

ARMAND Pierre | 30/05/1860 | Gevrier | 80 | Manoeuvre | Gevrier
AUCLAIR Pierre| 04/09/1860 | Annecy | 80 | Manoeuvre | Paris (1885),  Annecy (1899)
AUCLAIR François | 02/02/1859 | Annecy | 79 | Fileur de laine puis camionneur | Annecy
BARUT Joseph | 18/02/1860 | Annecy | 80 | Galocher |  Genève (1885-1888), Dijon, Voiron, Grenoble, Romagne-sous-Montfaucon, Grenoble
BEAUQUIS Jean | 19/02/1862 | Annecy | 82 | Journalier | Annecy
BEAUQUIS Jean-Claude | 03/08/1864 | Annecy | 84 | Manoeuvre | Annecy
BELLEVILLE Marie Hippolyte | 16/11/1867 | Seynod | 87 | Mineur | Annecy
BELLEVILLE François | 23/12/1866 | Bloye | 86 | Tailleur d'habits | Bloye
BERNARD Clément | 23/11/1862 | Annecy | 82 | Cardeur de coton | Annecy
BERTHOUD Louis | 14/01/1866 | Annecy | 86 | Manoeuvre | Annecy
BEVILLARD Claudius | 28/06/1867 | Annecy | 87 | Employé au chemin de fer | Dijon, Brides-les-Bains (1894), Annecy (1897), Lyon (1903-1915)
BIZE François | 08/06/1860 | Annecy | 80 | Cordonnier | Paris, Annecy (1891), Thônes(1895)
BOLLARD Prosper | 01/05/1868 | Doussard | 88 | Meunier | Reignier, Carouge (1894)  Genève (1913)
BORNAND Jean-Marie | 29/08/1868 | Annecy | 88 | Boucher | Annecy
BORNAND Jean-François| 25/06/1867 | Annecy | 87 | Cordonnier | Annecy, Aix-les-Bains (1893), Genève,Annecy (1895)
BOUCHARDY Joseph | 12/10/1869 | Moye | 89 | Cultivateur |  Cheignieu (1899), Ste-Foy-les-Lyon (1900), Gleyzi (1902), Villefranche-sur-Rhône (1904)
BOURGEOIS Louis | 13/07/1858 | Meythet | 78 | Cultivateur puis gendarme | Rarre (canton de Genève), Indre-et-Loire (1884)
BOUVIER Antoine François | 29/11/1864 | Aime | 84 | Serrurier | Genève, Lyon  (1886), Annecy (1887), Cluses (1891)
BOUVIER Joseph Aimé | 28/11/1864 | Annecy | 84 | Horloger | Genève (1887), Lyon  (1887), Dieulefit, Valréas (1888), Lyon  (1889-1890), L'Arbresle  (1896), Dompierre (1897), Lyon (1897-1898), Oyonnax (1898),  Lyon (1898-1900)
BOUVIER Eugène | 04/03/1864 | Saint Eustache | 84 | Marchand de parapluies | Charleroi,  Nyons (1891), Genève
BRUYERE Henry | 02/10/1859 | Annecy | 79 | Garçon épicier | Annecy, Clion (1884), Châteauroux (1902)
BUSCA Genis Joseph | 24/12/1867 | Clermont Ferrand | 87 | Fileur sur coton | Grenoble (1915)
CALLOUD Eloi Martin Auguste | 28/07/1867 | Annecy | 87 | Fondeur | Genève (1889-1902)
CHAGNON François Louis | 02/09/1863 | Annecy | 83 | Charretier | Ay (1885), Avize (1885), Epernay (1886-1901)
CHAPPUIS Auguste | 11/06/1865 | Seynod | 85 | Charpentier | Annecy
CHAPPUIS François Joseph | 02/03/1869 | Seynod | 89 | Bourrelier | Annecy
CLAVEL Claude | 04/08/1860 | Annecy | 80 | Tailleur de pierre | Brens Annecy (1883)
CLAVEL Jean | 15/02/1858 | Aix-les-Bains | 78 | Tailleur de pierre | Doussard (1887)
COCHET Jean-Pierre | 03/03/1859 | Annecy | 79 | Manoeuvre | Genève (1894), Annecy (1904)
COCHET Louis | 21/10/1861 | Annecy | 81 | Polisseur marbrier | Aix-les-Bains, Lyon (1890), Annecy (1893)
COCHET Claude Louis | 03/08/1862 | Annecy | 82 | Jardinier | Philippeville, Thonon (1889), Renan (Suisse) (1889-1898)
CORBET Eugène-Auguste | 04/07/1858 | Cuvat | 78 | Cultivateur | Cuvat
COUTURIER Joseph | 31/03/1861 | Annecy | 81 | Cordonnier | Annecy
CROCHON Joseph | 20/04/1866 | Annecy | 86 | Serrurier | Chambéry, Cognin (1896), Pont-de-Claix (1897), Grenoble (1907)
DALEX Auguste | 24/06/1866 | Doussard | 86 | Chapelier | ) : Annecy (1890-1893), Paris (1893), Vincennes (1894), Saint-Mandé (1895), Saint-Ouen(1905)
DECARROZ François Joseph | 19/04/1867 | Annecy | 87 | Chapelier | Annecy
DELETRAZ Narcisse | 21/05/1859 | Genève | 79 | Galocher | Annecy, Chaumont (1883), Lyon (1886-1890)
DERIPPE Claude | 25/10/1860 | Annecy | 80 | Garçon d'écurie | Lyon (1888), Annecy (1891)
DERONZIER Jean-François | 15/03/1868 | Annecy| 88 | Chapelier | Lyon (1902)
DEZERES Ambroise | 14/06/1866 | Annecy | 86| Employé de commerce |  Paris (1888-1895), Fontenay-aux-roses (1897), Chatenay-Malabry (1901)
DEZERES François Arsène | 12/10/1868 | Annecy | 88 | Maréchal-ferrant | Annecy
DIANI Dominique | 13/06/1862 | Annecy | Garçon de lavoir puis talonnier |  Paris (1888-1903)
DOMANGE Joseph | 19/07/1869| Annecy | 89 | Charpentier | Annecy
DUCROZ Joseph | 09/11/1862 | Annecy | 82 | Charpentier |  Chambéry (1900)
DUFRENE Marie Janin | 13/05/1866 | Annecy | 86 | Tripier | Annecy
DUNOYER Jean | 30/03/1866 | Annecy | 86 | Chapelier | Annecy
DURET Antoine | 29/01/1859 | Faverges | 79 | Ramoneur |  Besançon (1884)
DUSSOGE Marie | 24/02/1858 | Annecy | 78 | Coiffeur | Oullins, Lyon
EMINET Jean-Jacques | 16/07/1859 | Annecy | 79 | Chapelier | Châlons-sur-Saône
GACHET Eugène | 16/07/1858 | Sévrier | 78 | Manoeuvre | Néant
GACHET Frédéric | 06/01/1860 | Annecy | 80 | Fileur sur coton | Néant
GANTELET Martin Claude | 08/01/1861 | Annecy | 81 | Manoeuvre | Annecy
GANTELET Antoine François | 08/01/1861 | Annecy | 81 | Boucher | Annecy
GEOFFROY Auguste | 05/04/1861 | Annecy | 81 | Forgeron | Aix-les-Bains
GERMAIN Charles Claude | 25/09/1861 | Annecy | 81 | Chapelier | Annecy (1884)
GINDRE Victor | 29/02/1868 | Dardagny | 88 | Tailleur de limes | Annecy ,Genève(1890), Lyon (1891), Annecy (1891), Paris (1892-1903), Alfortville (1906-1912) :
GONDRAN Claude | 05/01/1867 | Lyon | 87 | Tailleur de pierres | Annecy
GRANGE Louis Philippe | 02/07/1865 | Annecy | 85 | Fondeur | Marseille, décédé au Tonkin (1888)
GUILLERMIN Saturnin Jean | 02/12/1860 | Annecy | 80 | Charpentier | Grenoble(1885), Tournon-sur-Ardèche
JOUVENOZ Antoine | 03/03/1866 | Annecy | 86 | Imprimeur | Annecy
JOUVENOZ Antoine Marie | 22/04/1862 | Annecy | 82 | Fileur sur coton | Toulon(1887), Annecy
JOUVENOZ Francis Louis | 22/10/1867 | Annecy | 87 | Journalier | Annecy, Porquerolles (1891-1892), Annecy
LACOMBE Auguste | 20/08/1866 | Annecy | 86 | Bourrelier | Annecy
LANCON Charles | 11/05/1860 | Gevrier | 80 | Mouleur sur fonte | Genève (1889), Gevrier (1892)
LAVOREL Joseph | 10/04/1865 | Epagny | 85 | Cultivateur | Epagny
LAVY Jean-Claude | 28/02/1869 | Annecy | 89 | Ferblantier | Lyon (1895-1897), Faverges (1892-1898)
LEPINE Jean-Claude | 29/09/1860 | Annecy | 80 | Tailleur de pierre | Annecy
LETTRAZ François Joseph | 16/01/1865 | Annecy | 85 | Chapelier | Annecy
LETTRAZ Pierre | 04/04/1863 | Annecy | 83 | Chapelier | Annecy (1886),
LETTRAZ Claude François | 15/11/1861 | Annecy | 81 | Cordonnier | Annecy
LEVRAT Auguste Victor | 27/02/1863 | Oyonnax | 83 | Domestique | Paris
LEVRON Louis | 15/02/1858 | Annecy | 78 | Garçon de magasin | Paris (1880)
LONG Louis Ernest | 23/01/1867 | Gevrier | 87 | Manoeuvre | Gevrier (1904)
LONGIS François | 29/01/1859 | Annecy | 79 | Serrurier Ajusteur | Narbonne, Paris (1886)
LONGIS Claude | 13/01/1861 | Annecy | 81 | Maçon | La-Tour-du-Pin
LYARD Auguste | 04/05/1864 | Poisy | 84 | Domestique | Satigny (1888-1895), Lyon
LYARD Joseph-Marie | 12/06/1867 | Poisy | 87 | Instituteur | Cusy
LYARD François | 21/04/1862 | Poisy | 82 | Cultivateur | Sainte-Foy-les-Lyon (1886-1899), Lyon
MALLINJOUD François-Aimé | 13/09/1862 | Annecy | 82 | Maître ramoneur | Charleroi, Genève (1888)
MARCO Pierre Joseph Dominique| 30/04/1867 | Annecy | 88 | Peintre en bâtiments | Lyon (1892-1907), Alger(1914)
METRAL Louis-Marie | 03/07/1864 | Annecy | 84 | Chapelier | Genève(1895), Annecy (1896) :
METRAL Jean | 15/04/1861 | Annecy | 81 | Manoeuvre | Lyon
METRAL Joseph François | 13/06/1869 | Annecy | 89 | Forgeron | Annecy
MIEVRE Jean-Claude | 13/03/1863 | Annecy | 83 | Charpentier | Lyon, Chambéry (1889), Paris (1893-1906)
MONTMASSON Jean Eugène | 15/01/1859 | Chapeiry | 79 | Boulanger | Genève, Grenoble (1886),  Vif (1892)
MONTMASSON César | 02/04/1867 | Annecy| 87| Ferblantier lampiste | Annecy
MONTMASSON Claude | 12/08/1858 | Annecy | 78 | Chapelier | Néant
MUGNIER Etienne | 28/09/1861 | Sévrier | 81 | Ferblantier | Paris, Lyon (1886-1888), Paris (1889)
PACORET Joseph | 21/11/1858 | Gevrier | 78 | Tisseur sur coton | Annecy
PARIS Charles | 29/04/1865 | Annecy | 85 | Chapelier | 1889 : Annecy
PEGUAT Joseph | 18/03/1858 | Annecy | 78 | Serrurier | Paris
PERISSIER François Joseph | 14/09/1860 | Héry-sur-Alby | 80 | Maréchal ferrant |  Héry-sur-Alby (1889)
PERRET Claude | 12/06/1869 | Annecy | 89 | Fileur sur coton | Annecy
PERROUD François Michel | 19/07/1866 | Annecy | 86 | Plâtrier | Lyon (1891)
POMMIER Jean-François | 23/11/1865 | Seynod | 85 | Cultivateur | Seynod
PUGET Jean-Louis | 07/01/1868 | Annecy | 88 | Cocher| Annecy
PUYMAURIN Antoine | 18/10/1860 trouvé à Annecy | 80 | Tisserand | Roanne (1885), Lyon (1888), Annecy (1895)
RAMUS Auguste | 14/01/1862 | Annecy | 82 | Fileur sur coton | Vanchy (1888), Bellegarde, Annecy(1905)
RAMUS Joseph | 08/11/1862 | Annecy | 82| Manoeuvre | Annecy
RAMUS Henri | 19/07/1867 | Annecy | 87 | Journalier | Annecy,  Paris (1893-1914), Pantin
RAVOIRE Jean-Pierre | 23/03/1858 | Annecy | 78 | Domestique | Nice
REGAT Louis Eugène | 17/12/1866 | Annecy | 86 | Fumiste | Annecy, La Roche (1892), Bonneville (1898)
REGAT Jean Ambroise | 26/07/1862 | Annecy | 83 | Coiffeur | Chalon-sur-Saône, Montbéliard, Dijon,  Lausanne (1887)
REIGNIER Gaëtan Louis | 30/05/1861 | Annecy | 81 | Manoeuvre | Annecy
REIGNIER Prosper | 16/11/1859 | Annecy | 79| Manœuvre puis cultivateur | Annecy
ROUX Jean | 16/02/1862 | Poisy | 82 | Garçon de peine | Paris (1884), Poissy (1892)
SAVOYEN André Jules | 28/02/1866 | Annecy | 86 | Tailleur de pierres puis télégraphiste militaire | Annecy
SAVOYEN Louis | 09/08/1860 | Annecy | 80 | Coiffeur | Faverges (1886)
SAVOYEN Marie Léonce | 31/07/1868 | Annecy | 88 | Manoeuvre |  : Grenoble(1893-1897)
SEGUET François | 29/01/1865 | Annecy | 85 | Typographe | Annecy, Lyon (1896-1909)
THOME Auguste | 18/09/1858 | Annecy | 78 | Manoeuvre à Annecy | Annecy
VALLET Joseph | 26/05/1861 | Annecy | 81 | Tailleur de pierre | Paris (1887), Saint-Just-en-Chevalet (1890), Annecy, Cessieu (1896), Poët-Laval (1898), Annecy (1905)
VAUTIER Jean | 26/09/1862 | Annecy | 82 | Peintre en bâtiments | Paris, Grenoble (1887-1906)
VOISIN François Emile | 21/09/1868 | Annecy | 88 | Valet de chambre | Lyon (1891-1907)

 

Bibliographie

Mathilde DUBESSET et Michelle ZANCARINI-FOURNEL, Parcours de femmes. Réalités et représentations. Saint-Etienne 1880-1950, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 1993, 270 p.

Jacques DUPÂQUIER et Denis KESSLER [dir], La société française au XIXe siècle. Traditions, transitions, transformations, Paris, Fayard, 1992, 529 p.

Jean-Claude FARCY et Alain FAURE, La mobilité d’une génération de Français. Recherche sur les migrations et les déménagements vers et dans Paris à la fin du XIXe siècle, Paris, Institut national d’études démographiques, cahier n°151, 2003, 591 p.

Paul GUICHONNET, L’émigration des Savoyards aux XIXe et XXe siècles, Histoire en Savoie n°29, Chambéry, Société Savoisienne d’Histoire et d’Archéologie, 2015, 148 p.

Nicolas MARTIGNOLES, Faire face au déclin. Directeurs et ouvrières de la Manufacture d’Annecy et Pont (1865-1906), L’Histoire en Savoie n°33, Chambéry, Société Savoisienne d’Histoire et d’Archéologie, 2018, 128 p.

Jean-Claude PASSERON et Jacques REVEL [dir], Penser par cas, Paris, Editions de l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, 2005, 292 p.

Paul-André ROSENTAL, « Qu’est-ce qu’une ressource locale ? Homéostasie et microanalyse en histoire sociale », Revue de synthèse, janvier-mars 2001, pp. 71-91.

Paul-André ROSENTAL, « Pour une analyse mésoscopique des migrations », Annales de démographie historique, 2002 (n°104), pp. 145-160.

Paul-André ROSENTAL, « La migration des femmes (et des hommes) en France au XIXe siècle », Annales de démographie historique, 2004 (n°107), pp. 107-135.

Notes

1 / Archives municipales d’Annecy (AMA), 4 I 1 (13).
2 / Cran est devenue Cran-Gevrier en 1902. Elle fait désormais partie de la commune nouvelle d’Annecy depuis le 1er janvier 2017.
3 / Nicolas MARTIGNOLES, Faire face au déclin. Directeurs et ouvrières de la Manufacture d’Annecy et Pont (1865-1906), L’Histoire en Savoie n°33, Société Savoisienne d’Histoire et d’Archéologie, Chambéry 2018, pp. 26-27.
4 / Archives départementales de la Haute-Savoie (AD 74), 4 FS 480 : Lettre du syndic d’Annecy à l’Intendant de la province du Genevois au sujet des industries (1840).
5 / AD 74, 15 J 1143 : livrets délivrés à la filature Sainte-Claire (1829-1882).
6 / AD 74, 15 J 1871 : inscription des ouvriers du tissage mécanique à Cran (1860-1880).
7 / AD 74, Sous-série 1R : préparation militaire et recrutement de l'armée. Données consultables à l’adresse suivante: http://archives.hautesavoie.fr/.
8 / Paul GUICHONNET, « Les sociétés savoyardes à Paris (1833-1910) », L’émigration des Savoyards aux XIXe et XXe siècles, Histoire en Savoie n°29, Société Savoisienne d’Histoire et d’Archéologie, Chambéry 2015, pp. 11-38.
9 / Jean-Claude PASSERON et Jacques REVEL [dir], Penser par cas, Paris, Editions de l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, 2005, 292 p.
10 / AD 74, 4 E 2812 : inventaire des mariages de l’état civil d’Annecy (1888).
11 / AD74, 10 M 02 : régime industriel (1861-1871, 1888).
12 / Jacques DUPAQUIER et Denis KESSLER [dir], La société française au XIXe siècle. Traditions, transitions, transformations, Paris, Fayard, 1992, p. 59.
13 / AMA, 2 I 27 (02) :Grèves, coalitions (1872-1875). AD 74, 10 M 36 : Grèves (1861-1902). AMA, 2 I 50 : Grèves (1900-1902).
14 / AD74, 4 E 2754 : inventaire des naissances de l’état civil d’Annecy (1862).
15 / AD 74, 4 E 2812 : inventaire des mariages de l’état civil d’Annecy (1888).
16 / AMA, 2 I 54 : Syndicat des ouvriers et des ouvrières des manufactures d’Annecy et de Cran (1902).
17 / AD 74, 4 E 2809 : inventaire des mariages de l’état civil d’Annecy (1885).
18 / AD 74, 6 M 118 : inventaire des recensements de la commune d’Annecy en 1901.
19/ AD 74, 4 E 3148 : inventaire des décès de l’état civil d’Annecy (1905).
20 / Mathilde DUBESSET et Michelle ZANCARINI-FOURNEL, Parcours de femmes. Réalités et représentations. Saint-Etienne 1880-1950, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 1993, p. 54.
21 / AMA, 2 I 41 : Police générale. Syndicat des Syndicat des ouvriers chapeliers fouleurs d’Annecy (1894).
22 / AMA, 2 I 25 : Police générale. Statuts des syndicats professionnels (1899-1905).
23 / Nicolas MARTIGNOLES, op. cit., p. 108.
24 / Paul-André ROSENTAL, « La migration des femmes (et des hommes) en France au XIXe siècle », Annales de démographie historique, n°107 (2004), p. 109.
25 / Jean-Claude FARCY et Alain FAURE, La mobilité d’une génération de Français. Recherche sur les migrations et les déménagements vers et dans Paris à la fin du XIXe siècle, Paris, Institut national d’études démographiques, cahier n°151, 2003, 591 p.
26 / Paul GUICHONNET, op.cit., p. 38.
27 / AD 74, 4 E 2754 : inventaire des naissances de l’état civil d’Annecy (1862).
28/ AD 74, 4 E 2815 : inventaire des mariages de l’état civil d’Annecy (1891).
29 / Paul-André ROSENTAL, « Qu’est-ce qu’une ressource locale ? Homéostasie et microanalyse en histoire sociale », Revue de synthèse, janvier-mars 2001, p. 79.
30 / AD 74, E 2754 : inventaire des naissances de l’état civil d’Annecy (1862).
31 / AD 74, 4 E 3148 : inventaire des décès de l’état civil d’Annecy (1905).
32 / AD 74, Sous-série 1R : Préparation militaire et recrutement de l'armée. AD 74, 6 M 118 : inventaire des recensements de la commune d’Annecy en 1901.
33 / Paul-André ROSENTAL, « Pour une analyse mésoscopique des migrations », Annales de démographie historique, 2002 (n°104), p. 154.
34 / AMA, 1 F 1 : inventaire des recensements de la commune d’Annecy (1808-1906).
35 / Jacques DUPÂQUIER et Denis KESSLER [dir], op.cit., pp. 158 et 363.

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