La Savoie est un legs du Moyen Âge. Entre l’an mille et le début du XIVe siècle, des terres nouvelles sont mises en valeur et, dans un contexte climatique favorable, les paysages se transforment profondément sous l’action de l’Homme. Des villages nouveaux apparaissent, de plus en plus haut en altitude, groupés autour des églises paroissiales, des chapelles et des cimetières. Vers 1250, les villages de la Savoie d’aujourd’hui sont tous là ou presque.
Plus nombreuse, la population paysanne défend ses droits au sein de communautés d’habitants de mieux en mieux organisées. Sièges de nouveaux pouvoirs territoriaux, des châteaux, des monastères et des prieurés sortent de terre, tandis que des bourgs se développent dans leur ombre. Les plus dynamiques d’entre eux, les mieux placés sur les routes transalpines qui s’animent, donnent naissances aux villes savoyardes.
Enfin, d’un conglomérat de droits seigneuriaux, et de territoire sans unité préexistante, les comtes font une principauté solidement administrée. De leur côté, les élites, aristocratiques et urbaines construisent lentement, autour du service du prince, une première forme d’identité savoyarde. Entre 1350 et 1450, cette société rurale est mise à rude épreuve par la pire catastrophe démographique de son histoire, la Peste Noire et la succession d’‘épidémies qui réduisent sa population de moitié en un demi-siècle. Elle tient bon, malgré tout, et aborde le XVIe siècle avec un dynamisme retrouvé.
Cette histoire sans batailles, dont les héros sont les populations rurales, et le sujet principal la construction des paysages et des territoires, est le résultat des recherches entreprises depuis plus d’une décennie dans le cadre de l’Université de Savoie.
Fabrice Mouthon est maître de conférences en Histoire médiévale à l’Université de Savoie.